L’agilité propose un concept d « équipe pluridisciplinaire » qui est parfois mal interprété et bien souvent difficile à mettre en œuvre.
La mauvaise interprétation consiste à penser que chaque équipier doit savoir tout faire (dont que tout le monde est spécialiste de tous les domaines). Si c’est possible, c’est génial, ne vous en privez pas, l’efficacité de votre équipe n’en sera que meilleure. Mais généralement c’est impossible par manque de temps, d’argent et surtout de désir personnel des individus.
Vous trouverez de nombreux articles qui décrivent les bénéfices d’une équipe pluridisciplinaire. Et de mon point de vue, le bénéfice principal est de permettre de réellement prioriser les choses à faire sur la base de la valeur pour l’utilisateur/client sans avoir à tenir compte des compétences disponibles dans l’équipe durant l’itération/version à venir.
A la formation d’une équipe les personnes qui la composent ont souvent des compétences distinctes. Dans l’IT, on trouve par exemple des architectes, des développeurs Front, des développeurs Back, des testeurs, des opérations. En dehors de l’IT (beaucoup de projets que j’accompagne actuellement), c’est des mécaniciens, des électriciens, des mathématiciens, des spécialistes des gaz, des qualiticiens …
Alors comment faire pour aider une équipe à devenir pluridisciplinaire ?
Voici quelques techniques que j’utilise et qui peuvent donner de bons résultats (ce ne sont pas des solutions toutes faites, il vous faudra réfléchir à la meilleure façon de les mettre en œuvre dans votre contexte).
Limiter le nombre d’éléments en cours de réalisation
C’est une règle d’équipe qui focalise l’énergie de l’équipe sur la nécessité de terminer les choses en cours. Donc plutôt que d’aller chercher plus loin dans la liste des choses à faire une tâche dans son domaine de compétence, un équipier devra se creuser les méninges pour aider un autre équipier ou travailler sur une domaine qui n’est pas le sien.
La difficulté de cette règle est que beaucoup d’équipiers la transgresse car ils se disent, et leur manager également, que c’est une perte de temps et d’argent que de ne rien faire ou de mettre plus de temps à faire quelque chose qui pourrait être fait par le spécialiste.
Décomposer finement les choses à faire
Plus l’élément est macroscopique, et plus il est difficile, pour un équipier ne connaissant pas le sujet, de s’y atteler. Par crainte d’échouer, par peur de faire perdre du temps aux équipiers qui sont déjà dessus, par volonté de rester dans sa zone de confort, ou en ne sachant tout simplement pas par quel bout commencer …
En découpant finement les choses à faire, l’équipe augmente la possibilité pour un équipier de trouver une tâche qu’il se sent en mesure de réaliser.
De plus, c’est plutôt rassurant de tenter l’aventure sur une tâche d’une 1/2 journée, même si on y passe 1 journée voir plus.
Cartographier les compétences de l’équipe
Plusieurs articles parlent de compétence des équipiers agiles et introduisent les notions de « T-shaped », « Pi-Shaped » voir de « Comb-shaped » pour chaque équipier.
De mon côté, je préfère cartographier les compétences au niveau de l’équipe, et ce pour une version donnée du produit (quelques mois de réalisation). Lorsque la vision de la prochaine version est présentée aux équipiers, ceux-ci peuvent essayer d’estimer (avec surement une dose d’erreur importante) le niveau de compétence nécessaire pour que l’équipe soit pluridisciplinaire. Ensuite, chaque équipier estime son niveau dans chacune des compétence nécessaire au projet, par exemple avec une échelle de 0 (je n’y connais rien) à 5 (je suis expert).
Si par exemple le besoin en test est de 15, et que la somme des compétences individuelles dépasse 15, c’est bon. Sinon les équipiers proposent un programme de montée en compétence (formation, codéveloppement …) qui sera intégré dans la liste des choses à faire (car cela prend du temps) de la version.
Jouer le jeu de l’apprentissage
« Allez, pour la prochaine itération chacun d’entre nous va essayer de faire une tâche qui n’est pas dans ses compétences, et pour suivre la progression du jeu, nous allons afficher une feuille avec 2 colonnes : dans la 1ère colonne les prénoms des équipiers et dans la 2ème colonne la tâche qu’il ont fait en dehors de leur spécialité (à mettre lors de la réunion quotidienne et avec accord des autres équipiers) »
« Et celui ou celle qui n’aura rien mis à la fin de l’itération devra faire lui-même ou elle-même un gâteau maison pour toute l’équipe »